L’Eurasie à vélo #0, Chronique

Publié le 28/02/2022

Dans  » La forteresse Europe « , publié le 28 novembre dernier, j’évoquais: « A force de voyager, l’actualité me ramène souvent à une région et parfois même à un point très précis du globe que j’ai un jour parcouru. A des visages, des vies, des destins. J’en ai la chair de poule. » En écho à un voyage de six mois le long de la frontière orientale de l’Europe en 2011, notamment les zones grises du continent Européen, l’enclave de Kaliningrad, la Biélorussie et la Transnistrie, qui fit l’objet de mon sixième livre, L’homme-frontière (Ukraine occidentale pp.97 à 101) paru aux éditions Slatkine en 2013.

En réalité, je découvris l’Ukraine à vélo en 1994, à une dure époque de grande incertitude, peu après la glasnost et la perestroïka. Je fus agressé par deux fois (ce qui aurait pu se passer absolument n’importe où, je tiens à le préciser, et se révéla, en réalité être un talisman pendant 7 ans). Je connus une belle histoire d’amour et fus littéralement invité chaque soir dans une autre famille pendant ma traversée qui dura un mois et demi, avant d’entrer en Russie, à Rostov-sur-le-Don. Les Russes m’accueillirent à leur tour avec la même générosité. Cette hospitalité reçue dans tous mes voyages me couvre à jamais d’une dette de reconnaissance que je ne serai pas à même de rembourser de mon vivant.

L’agression de l’Ukraine par la Russie qui a débuté en 2014, a et aura des conséquences incalculables sur le cours du monde. La présidente de la Géorgie Salomé Zourabichvili nous l’a rappelé récemment, avec courage, lucidité et l’expérience tragique de l’annexion et l’occupation russe de son pays par le passé puis la création par la force de l’Abkhazie et l’Adjarie en 2008. J’ai une profonde affection pour tous les habitants.tes de la planète et, dans la situation actuelle, des pensées particulièrement aux hommes et femmes vivant dans les Balkans et dans tous les pays dit de l’Est que j’ai traversés à vélo (à l’exception de la République tchèque, également visitée), à plusieurs reprises (en1981, 1984, 1994, 2004 et 2011). Comme l’écrivit si bien Paolo Rumiz dans Aux frontières de l’Europe (Collection Étonnants voyageurs – Hoëbeke, 2011): « Le coeur de l’Europe bat à L’Est« . Une assertion positive, pleinement vécue et jamais démentie.

Par deux fois (en 1994 puis en 2004), je me suis rendu au consulat russe pour obtenir un visa. Il est situé juste au bout de « ma rue », celle que j’emprunte quotidiennement à pied ou à vélo, lorsque je me trouve à Genève. Depuis peu, il s’est transformé en camp retranché, gardé par des barrières Vauban cadenassées entre elles sou l’oeil vigilant d’un policier armé d’une mitraillette, parfois terré dans sa cahute aux vitres teintées:

Ironie de l’histoire, l’emplacement contigu du Consulat Général de Russie et la mission permanente de l’Ukraine auprès des Nations Unies, logique jusqu’à l’effondrement de l’URSS, est resté le même aujourd’hui. Mais désormais, au langage de la force employé par le pouvoir russe, répondent des fleurs, des messages d’affection et des colis qui parviennent sans discontinuer à la mission ukrainienne:

Le 12 mars 1994, je donnai mes premiers coups de pédale à Genève en direction du Japon…. Le 4 juillet de la même année paraissait mon premier article dans La Tribune de Genève, une chronique de 74 articles (parfois avec photos) intitulée L’Eurasie à vélo qui se termina en janvier 1998. Ouvrez l’oeil! Dès samedi prochain le 12 mars 2002, 27 ans jour pour jour après mon départ à vélo depuis ma ville natale, je souhaite vous faire partager mes articles publiés alors (de modestes brèves aux quelques pleines pages) ici même, sur mon site internet.