Noroeste argentino # 4: Ruta 40

Publié le 18/10/2019

De La Quiaca, le septentrion de l’Argentine, on prend le vertige à imaginer les quelques 5125 km à pédaler pour atteindre Ushuaïa, son extrémité méridionale… un pays presque aussi étendu que le plateau tibétain de Kashgar à Chengdu!

En terme de route, c’est une piste, diablement sauvage, qui relie de fragiles communautés humaines presque oubliées, où la maison de dieu est toujours, et de loin, la plus solide et la plus imposante des habitations.

Gracieuses vigognes qui s’enfuient à mon passage ou troupeaux de lamas: le paysage inerte et désolé impose le mouvement. Mon compteur kilométrique a rendu l’âme, je navigue à vue sur la tôle ondulée, le sable, la pierre et les maigres broussailles. Parfois, la piste disparaît dans un canyon. Un mince filet d’eau chante: de l’eau chaude, douce ou salée? C’est à chaque fois la surprise. Lave refroidie aux formes fantasmagoriques, blocs de rochers arrêtés dans leur course de quelques millions d’années, volcans tondus. L’existence d’un arbre à plus de 4000 mètres d’altitude, tient ici du miracle. Et c’est le printemps. L’hiver et son -15 degrés fige encore plus les hameaux et leurs hommes aux visages burinés qui vivent de la mine. Leur sous-sol est partout objet de convoitise. C’est une contrée où l’on sert le poing.

Le paysage est tibétain. A l’exception notable des volcans, de l’absence de glaciers et de montagnes enneigées. Pas de monastère édifié sur des promontoires, même si quelque fois les rochers me feraient croire le contraire. Aucune couleur chaude, sauf au couchant, rien que des tonalités ocres, ou bleues ou vertes.