L’Eurasie à vélo #5: La Hongrie creuse la différence

Publié le 16/03/2022

Au delà de Vienne, c’est la plaine infinie. Un monde horizontal balayé par le vent et la pluie. Pour toute frontière, l’Autriche a planté un cabanon de bois désuet gardé par un soldat. La Hongrie, par contre, présente une vraie douane, massive et moderne. Franchement, je m’attendais au contraire. Mais l’impression est de courte durée. La première route hongroise, cahoteuse, creuse tout de suite la différence, comme si, à l’approche progressive de l’Orient, la route et les gens prenaient de plus en plus de relief.

Portrait saisonnier d’un pays spongieux, cru, froid et silencieux, accroché encore à l’hiver. Terres noires à perte de vue, aux angles desquelles se blotissent des demeures pareilles les unes aux autres, avec leur portail, leur jardin, leur cheminée qui fume et leur chien qui aboie au passage du cycliste. Le temps maussade accentue l’impression de désolation que dégagent les carreaux brisés, les rambardes rouillées, les façades meurtries des usines, des fermes collectives et des casernes.

L’Eurasie à vélo par Claude Marthaler, La Tribune de Genève, été 1994