L’Eurasie à vélo #21: Un visa et quelques abricots
Publié le 03/04/2022
La frontière entre le Daghestan (Russie) et l’Azerbaïdjan n’est pas une frontière. J’avais joué un quitte ou double en pédalant 800 km plein sud sans savoir s’il me fallait un visa ou non pour l’Azerbaïdjan. « T’as faim? » me dit le douanier. Aussitôt je me retrouve dans un cabanon entouré de tomates et d’abricots et le tampon d’entrée s’abat comme une lettre à la poste sur mon passeport.
Je quitte insensiblement l’Europe et le monde russe pour aborder le monde turc. Je constate une fois de plus, physiquement, comment les zones d’influence des mentalités et des populations débordent largement du cadre des frontières tracées. Les tchaïkhana ne désemplissent pas de joueurs de cartes ou d’échecs à l’ombre des noyers, parcourus par des filets d’eau. Aux tables bordées, je retrouve avec plaisir ce savoir-vivre, cette douceur si souvent absente en Ukraine ou en Russie: le fait élémentaire de servir et d’être servi avec courtoisie.
L’Eurasie à vélo par Claude Marthaler, La Tribune de Genève, été 1994